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Motif Ingredients foodtech

À peine lancée, la startup Motif Ingredients collecte 90M$ pour révolutionner les alternatives végétales aux produits animaux

Le futur de l’alimentation peut parfois sembler bien complexe : il faudra en 2050 nourrir 10 milliards de personnes, sur une planète au bord du non-retour climatique. Le choix entre le goût, le coût, la santé ou l’environnement se révèle cornélien : et si on trouvait un compromis ?

Logo motif ingredientsSon nom ne vous dit peut-être encore rien, mais Motif Ingredients s’apprête peut-être à révolutionner le monde de la foodtech. Spin-off de la biotech américaine Ginkgo Bioworks, cette startup s’est fixé  pour objectif de créer toute une gamme d‘ingrédients nécessaires à la fabrication d’alternatives végétales à la viande, au lait et aux œufs. Motif Ingredients vient de récolter 90M$ de fonds au cours d’un financement de série A, en faisant le plus important lancement foodtech de l’histoire. Jonathan McIntyre, PDG, résume la vision de la marque “À travers la biotechnologie et la fermentation, Motif  Ingredients va propulser la prochaine révolution alimentaire avec des ingrédients durables, abordables et disponibles, répondant aux standards des chefs, des créateurs d’aliments et des marques visionnaires »

Un round d’investissement qui témoigne de l’immense potentiel du marché

Beyond MeatPlus d’une vingtaine d’investisseurs prestigieux rassemblés dans le fonds Breakthrough Energy Ventures ont décidé de miser sur la jeune entreprise, dont certains Bill Gates (fondateur de Microsoft), Jeff Bezos (fondateur d’Amazon), Jack Ma (fondateur du géant du commerce en ligne Alibaba) et Xavier Niel (fondateur de Free et d’Illiad). Certains n’en sont pas à leur coup d’essai :  Bill Gates a par exemple déjà versé des millions de dollars depuis 2013 dans les sociétés américaines spécialisées en alternatives végétales à la viande : Impossible Foods, Beyond Meat, ainsi que Memphis Meats, entreprise créant de la viande à partir de cellules souches. De son côté Jeff Bezos, via son gestionnaire de patrimoine, a également participé à une levée de fonds de 30 millions de dollars dans NotCo, une start-up spécialisée dans les alternatives aux protéines animales.

Aux côtés de Breakthrough Energy Ventures, on retrouve le géant du négoce de produits agricoles Louis Dreyfus Company, la coopérative laitière néo-zélandaise Fonterra, et le fonds d’investissement américain Viking Global Investors. La diversité des acteurs et des secteurs d’activités représentés confirme bien l’engouement global pour la tendance des alternatives aux protéines animales,comme le fait remarquer Judith Swales, Directrice des opérations chez Fonterra :

Le secteur de l’alimentation alternative – où les protéines issues des plantes, des insectes, des algues ou produites par fermentation coexistent avec les protéines animales, dont le lait de vache – évolue rapidement. On ne parle pas de choisir l’une ou l’autre source, mais de cohabiter .

Quand la science rejoint la fiction

Logo Ginkgo BioworksGingko Bioworks, société mère de Motif Ingredients, est connue pour sa capacité à produire rapidement de l’ADN à partir de microbes modifiés, pour des applications allant du remplacement d’engrais à la production de parfums. Tom Knight (cofondateur de Gingko Bioworks et ex-spécialiste en informatique converti à la biologie) compare la biologie synthétique à la programmation informatique. « Nous sommes des sortes de développeurs écrivant une application microbienne » dit-il. « Et nos clients viennent nous dire ‘hey, pouvez-vous me créer une application qui fait ça ?’ ».

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Gingko Bioworks applique les process de standardisation et d’automatisation de l’industrie au monde de la biologie. Mais à échelle moléculaire. “Nous faisons des changements sur l’ADN. On peut le lire, et on peut l’écrire. C’est digital », explique Jason Kelly.

La société va en premier lieu identifier génétiquement protéines, vitamines, glucides, etc. contenus dans les aliments dérivés d’animaux. Motif s’appuie sur la technologie de Gingko Bioworks, qui est insérée dans des cellules de levure modifiées. La levure est ensuite fermentée, comme dans le brassage de la bière, excepté qu’au lieu de produire de l’alcool, la levure crée les substituts que les clients de Motif souhaitent obtenir. Ces ingrédients peuvent être personnalisés pour imiter des saveurs ou des textures semblables à celles que l’on trouve dans des produits riches en protéines comme le bœuf et les produits laitiers. L’entreprise souhaite à terme proposer un catalogue étendu de produits de substitution aux protéines animales. Cette initiative pourrait changer la donne dans l’industrie grandissante des aliments d’origine végétale, qui a vu l’ensemble de ses produits, des steaks végétaux aux substituts de fromage, gagner en popularité au cours des dernières années.

Une approche unique par rapport au milieu

Avant Motif Ingredients, une entreprise qui souhaitait se lancer sur le secteur des produits issus de la biotech se heurtaient bien souvent à la barrière du financement. « On exigeait des entreprises de réaliser l’impossible. Hey, créez une marque, développez un nouveau produit, et pendant que vous y êtes, pourquoi ne pas monter une équipe R&D en biotechnologies pour créer quelques-unes de ces protéines clés dont vous aurez besoin pour effectivement produire ces trucs », ironise Jason Kelly, co-fondateur de Gingko Bioworks.

Au lieu de lancer une gamme de produits finis, Motif Ingredients va donc se positionner en tant que fournisseur et non comme distributeur de produits finis. Brisant les barrières à l’entrée et ouvrant une nouvelle ère pour les entreprises agroalimentaires qui n’osaient pas se lancer dans ce secteur faute de fonds insuffisants pour développer leurs propres laboratoires. « Nous nous concentrons sur ce que nous pouvons apporter à la supply chain existante pour la rendre meilleure. Toutes ces entreprises en auront besoin si elles veulent créer des bâtonnets de poisson végétaux avec un bon gout », renchérit Kelly. Géants de l’agroalimentaire, PME, startups, Motif veut mettre ses ingrédients entre toutes les mains.

À quand les vôtres ? Peut-être pas pour tout de suite, la réglementation européenne renâclant fortement devant les Organismes Génétiquement Modifiés. Dans la plupart des projets européens en attente d’un feu vert éventuel de Bruxelles, les Microbes Génétiquement Modifiés ont été obtenus par une autre technique que la transgenèse (c’est-à-dire sans apport de gènes d’une autre espèce) afin qu’ils puissent, comme les “OGM cachés”, échapper à la législation européenne sur les OGM (la mutagenèse par exemple est considérée comme historique et exemptée de la directive sur les OGM). Pour Motif Ingredients, les microorganismes OGM utilisés ne sont pas le produit final, la question reste donc en suspens.

Une alternative vraiment écologique ?

Gingko Bioworks n’en est pas à son coup d’essai sur les projets durables : créée en 2017 conjointement avec Bayer, l’entreprise Joyn Bio exploite les interactions entre bactéries fixatrices d’azote du sol et plantes. Le but : réduire les quantités de fertilisants azotés utilisés et donc l’utilisation d’énergies fossiles et de gaz à effet de serre émis par l’agriculture aujourd’hui, en augmentant par le biais de modifications génomiques la capacité des bactéries à fournir de l’azote aux plantes.

Le même schéma se répète pour Motif Ingredients: en employant une fraction de l’eau, des terres et de l’énergie nécessaire à l’élevage, aujourd’hui contributeur majeur aux émissions de gaz à effet de serre, l’entreprise réduirait drastiquement l’empreinte écologique nécessaire pour « créer de la protéine » par rapport aux méthodes conventionnelles. Motif Ingredients part du principe qu’il faut trouver des solutions pour fournir 10 milliards d’habitants en protéines, et propose la sienne. Sur le papier, celle-ci semble idéale, mais les conséquences éventuelles sur la santé de tels ingrédients restent encore incertaines.

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